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  • Photo du rédacteurTiphaine Dechipre

Jour 1 : Tivernon. 104 KM.

Le mardi 3 mars sonne le départ de cette aventure. Dans un premier temps, destination Madrid avec Simon. Pour la suite, on verra le moment venu.



Départ à 10h30 du Trocadéro, quoi de plus normal, une capitale pour une autre. Chargée à 12 kilos pour ma part, un peu moins pour Simon qui est allé jusqu'à couper sa brosse à dents pour économiser 12 grammes, nous sommes prêts pour le périple qui nous attend. L'enthousiasme des débuts rend la fatigue inexistante, tout ce qu'on veut à ce moment-là, c'est quitter Paris.


Pause déjeuner dans un restaurant ne proposant que de la cuisine Bio et locale, le Buffalo Grill bien sûr, pour savourer (que dis-je, dévorer! ) leur menu au nom évocateur : "Hold-up". Budget serré respecté haut la main pour ce premier jour. Et en prime, le responsable nous permet de mettre nos vélos dans un local fermé à clef, la phobie de Simon étant qu'on se les fasse braquer. Phobie que je n'aurais jamais partagée s'il ne m'avait pas dépeint ce tableau de nos têtes de vainqueurs, attendant sur le quai de la gare notre train direction Paris, la queue/le casque entre les jambes.


On y retourne. Et là, première leçon de la cycliste du dimanche que je suis : " Ta pause déj, tu apprécieras mais prépare-toi car la reprise t'achèvera".


Au bout de quelques heures la réalité nous rattrape sans ménagement, la galère commence. Des parties de nos corps en feu, nos vêtements trempés alors que la pluie ne s'est même pas encore invitée et la conscience que ce n'est que le début. A ce moment une seule chose me revient à l'esprit : "Tu n'as pas le droit de te plaindre, même intérieurement, car cette aventure, tu l'as voulue". Oh que oui je l'ai voulue. Malheureusement, ça n'aide pas à anesthésier la douleur. Ainsi, beaucoup de grimaces, mais instantanément remplacées par des sourires en croisant ceux des promeneurs au regard bienveillant. Ça, ça aide. Merci à eux.


Deuxième leçon : "En matière de coup de pédale, ton camp tu choisiras". Deux options s'offrent en effet :

- Faible résistance => douleur moindre mais vitesse moindre. Prépare-toi à être concurrencé par Gary l’escargot. Si tu veux gagner cette bataille, tu devras enchaîner les coups de pédale à une vitesse effrénée. Camp Simon.

- Plus de résistance => plus de douleur mais plus de vitesse. Camp Tiphaine. Et oui, pédaler dans la semoule, c'est vraiment pas mon truc.


Lorsqu'on constate sa capacité à me distancer, l'on pourrait croire que son camp est le bon. Que nenni, c'est juste lui. Celui que l'on surnomme Fat Fly dans le milieu du para, ou encore "le gros" au CERP Alsace, est une machine aux cuisses en béton armé, redoutable d'efficacité. Big up !




14h12. Une petite pluie s'invite, de celle qui apparaît comme la providence tant on avait chaud. Elle s'arrête trois minutes après, juste ce qu'il fallait, la providence je vous dis. L'après-midi se poursuit, ponctuée de pertes et de regains d'énergie. Malheureusement, certaines montées auront eu raison de nous. Obligés de mettre le pied à terre et par la même occasion, de constater la petitesse de nos capacités, rendant la perspective des Pyrénées d’autant plus effrayante. Reste à savoir si notre résistance va augmenter au fil du voyage ou bien nous abandonner. Coming soon...


16h20. C'est au tour de la grêle de rejoindre la partie. Ça fait rire au début, ça fait mal ensuite. On avait une seule descente dont on pouvait profiter, et cette c******* de grêle arrive pile à cet instant-là. Ce qui devait être un moment de pur plaisir s'est transformé en quelques secondes en un vrai calvaire : des coups de fouet au visage et les yeux noyés, obligés de freiner alors que c'était là l'occasion d'avancer sans peine.




18h30. Arrivée à Tivernon (Certes. Mais vous n'avez rien d'autre à faire que de juger le cadrage ? ^^). Un coin paumé que ma mère n'a même pas réussi à trouver sur Mappy, bref une réalité encore très lointaine des paysages espagnols qui me hantent. A la recherche de notre Airbnb, un habitant vient spontanément nous proposer son aide et nous dit que le graal se trouve à un kilomètre de plus. On lui rit carrément au nez tant ce dernier kilomètre était inenvisageable. Simon a bien fait de ne pas l'écouter puisque la maisonnée recherchée nous attendait à cinquante mètres à peine.


Nous sommes accueillis par Olaf qui hébergeait déjà deux autres voyageurs (ou plutôt travailleurs en l’occurrence). L'occasion de passer une très bonne soirée en excellente compagnie. Olaf possède des poules, des cochons mais n'est pas éleveur. Je lui demande sans y croire s'il tue ces bêtes... et bien oui, c'est pour sa propre consommation. Il sait ce qu'il mange contrairement à ce qu'on peut trouver sous vide en supermarché : pas faux et assurément plus sain.

- Mais tu tues de tes mains.

- Et toi tu laisses à d'autres le soin de le faire quand tu vas au supermarché.

True fact. Cela fait un moment que je me dis qu'on ne devrait manger de la viande que si l'on a assez de cran pour tuer un animal. Cette rencontre me le rappelle. Malheureusement, mon désamour pour les légumes prend le pas sur mes convictions. Honteux je sais, mais le vegan c'est pas encore pour moi.









Je n'ai pas pensé à lui demander à quoi lui servait cette chèvre. Je sais juste qu'il ne fait pas de fromage lui-même... J'en déduis qu'il s'agit d'un animal de compagnie. J'espère pour elle.












L'ambiance battait son plein, nous étions à table, prêts à savourer... une plâtrée de pâtes au pesto rosso. Oui, rester dans le conventionnel a aussi du bon. La conversation était captivante et pourtant, on a beugué. Au moment de cette première bouchée de pâtes, après cette journée éprouvante, pas un mot, juste un regard.


Un regard qui voulait dire "Je n'écoute plus personne, je savoure ces pâtes qui me réconfortent plus que les bras d'un être cher, qui me soignent plus qu'un pèlerinage à Lourdes et qui sont plus précieuses qu'une tonne de caviar". J'en ai explosé de rire tellement ce sentiment était disproportionné par rapport à... à tout en fait. Un sentiment que je n'avais jamais connu jusqu'alors et qui me fait dire que je ne sais vraiment pas apprécier la nourriture à sa juste valeur. Le chemin est long, sur tous les plans.


22h30. L'heure est venue de se coucher et surtout pour moi de publier ce tout premier post. Terrassée par une réalité affligeante : pas de wifi. Houston, nous avons un problème. Simon me dit d'aller dormir. Après tout, une nuit de 10 heures, ça ne m'était pas arrivé depuis des lustres. Les plaisirs simples sont finalement les meilleurs.


PS : je voulais raconter la journée d'aujourd'hui, soit le 4/03, mais il est 1h01 à l'heure où j'écris ces mots. Ce sera pour demain, après sept heures sous la pluie. A vélo, au cas où vous n'auriez pas encore compris ; ) .


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