Réveil dans cette location en village vacance dans laquelle nous n’avions même pas un torchon pour essuyer notre vaisselle et devions dormir dans des draps jetables. Ça faisait peine à voir, ce n’était pas du tout agréable et en prime, ça n’accélérait même pas la partie ménage.
Une fois en selle, nous empruntons une petite piste cyclable un peu sinueuse, jalonnée d’épines de pins encore humides du fait de la rosée du matin. Elle était parfaite pour moi. De longues minutes passent sans que nous échangions un mot, chacun dans nos pensées alors qu’elles étaient précisément identiques. Arrivés sur une côte minuscule, j’explose de rire. « Tu sais, hein » balance Simon. Oui, nous n’avions pas le cœur à grimper ce qui s’apparentait davantage à un monticule mais n’avions pas le droit de mettre le pied à terre sinon c’était admettre qu’on ne passerait jamais la suite. Le ton était donné et nous commençons à en discuter sans détours, envisageant toutes les possibilités mais concluant à chaque fois, qu’on ne pouvait rien prévoir.
Nous arrivons rapidement à Hossegor. Je n’y avais jamais mis les pieds et il aura suffi de quelques minutes pour que je tombe sous le charme. Ses boutiques sur le port, ses bateaux échoués pour cause de marée basse, le surf, son institution. J’aurais voulu m’arrêter mille fois mais… « On est des traceurs nous ! ». Bayonne. Nous n’en avons pas vu grand-chose, je me rappelle juste d’un pont aux rambardes rouges au-dessus de l’eau et d’une forte odeur de poissonnerie. Le centre et ses soirées endiablées lors des ferias, ce sera pour une autre fois. Biarritz. La même ambiance qu’à Hossegor. Je comprends la réputation de cette côte, elle est plus que méritée.
Durant tout ce temps, je sens Simon au bout du rouleau, il ne prend aucun plaisir à être là. Il a mal dormi du fait de sa découverte de la veille et pense rouler vers une déception. Quant à moi, je me fais toute petite, ne sachant quoi dire pour lui remonter le moral et n’osant partager ma renaissance. En effet, mes genoux vont déjà beaucoup mieux, une délivrance !
Nous poursuivons notre route et passons à côté de maisons absolument magnifiques. Les gens qui vivent ici ont du goût et les moyens de leurs prétentions. Je me laisse aller à imaginer ce que serait une vie d’auteure ici : une matinée à surfer, une après-midi à écrire ou bien l’inverse et le soir, une terrasse en bois permettant mille types d’ambiances. Autant dire que je n’ai aucun mal à m’y voir, mais dans cette vision, je commence à avoir des rides au coin des yeux. Il y a tant d’autres choses à vivre, à voir et à accomplir avant d’en arriver là.
Nous arrivons sur Bidart, une commune toute en hauteur et apercevons enfin la mer au loin. Et dans cette charmante ville haut-perchée, je signe ici la deuxième chute de notre expédition. Les ingrédients ont changé. Il vous faut : le sentiment de déranger si vous restez sur cette route étroite, un minuscule espace de côté, coincé entre une rambarde et un muret de 20 centimètres de haut, une sacoche qui se cogne contre ladite rambarde, une perte d’équilibre qui ne peut être maîtrisée du fait dudit muret. La chute en plein milieu de la route est assurée. La prochaine fois, je dérangerai !
Cette fois-ci, c’est mon coude droit qui a pris un coup mais ce n’est pas grave, on se remet en selle et roulez jeunesse. On veut juste trouver un endroit pour manger, on a tous les deux besoin d’une pause. L’on cherchait de base une boulangerie pour acheter un sandwich vite fait, l’on ne trouvait que des restaurants où les tables étaient recouvertes de nappes en tissu, et enfin nous trouvons le graal : le Star truck ! Si un jour, vous passez dans cette ville, arrêtez-vous manger un burger ou des fallafels préparés dans ce fourgon aux allures de caravane de l’espace, le modèle Airstream pour les connaisseurs. Il y avait également un énorme bus vert sur deux niveaux, ainsi que plusieurs autres petites caravanes. Leur seul point commun ? Elles étaient atypiques. Au milieu de cette place en graviers, des chaises dépareillées, des tables en bois, des bobines géantes. Un joyeux fourre-tout qui donne le sentiment d’être chez soi à ceux qui aiment ne pas se prendre la tête. En prime, leurs frites ! Je vous le dis, vous n’en avez jamais mangé d’aussi bonnes. L’été, des concerts sont organisés, l’endroit est bondé. Ils ont pignon sur rue, et là aussi c’est mérité.
Nous poursuivons notre route. Simon va mieux ; le pouvoir d’un bon burger-frites. Nous arrivons dans un endroit idyllique. De l’herbe verte à ma gauche, l’océan en contrebas à ma droite et ce sentiment d’être chanceux. Nous continuons longtemps sur ce chemin mais jamais assez pour être repus de cet air iodé ou du bruit des vagues. S’il avait dû être le dernier jour de cette aventure, ce chemin m’aurait suffi à partir sans regrets.
Arrivés aux pieds d’Hendaye, ça se gâte. Nous sommes au niveau de la mer, sur le plancher des vaches ou plutôt des chevaux en l’occurrence. Simon se fait deux nouveaux copains qu’il trouvait bien trop maigres, il leur a donc tout naturellement donné une barre de céréales comme si ça suffisait à les remplumer. L’intention était mignonne.
Nous continuons à peine quelques mètres, et là ! Une côte, mais une côte ! Si raide qu’on se disait qu’on basculerait en arrière si on restait sur le vélo. On la grimpe donc à pieds, on pousse le vélo mais on rigole tellement que bien vite la progression est impossible. On fait une pause pour rire, le genre de pause auxquelles on ne pense pas spontanément mais qui sont pourtant les meilleures. Simon s’assoit par terre, tellement il était gavé de tout.
On reprend nos esprits et on grimpe, on a que ça à faire de toute façon. Une fois en haut, on peut enfin remonter sur le vélo, on continue et on arrive sur un chemin, qui descend cette fois. Une descente, mais une descente ! Si raide que je me disais que je basculerai en avant si je restais sur le vélo. Rajouter à ça des crevasses et des cailloux écharpés, on est descendus à pied pour s’assurer que l’endroit était praticable. Ça ne l’était pas, encore une fois, merci Géovélo. On remonte en poussant les vélos. Simon s’embarque alors dans un mutisme qui ne trahissait que son énervement. Il est vrai que c’était censé être une petite journée, mais on aura jamais autant galéré à faire ces huit derniers kilomètres.
On arrive enfin au logement. Simon me demande si ce ne serait pas une bonne idée de prendre une journée de repos avant d’attaquer le gros morceau. Bien sûr que si, ça ne pourra pas nous faire de mal. Le restau que j’avais dans le viseur ferme à 19h30, ça ne vaut pas le coup. Une soirée canapé, ça non plus, ça ne nous fera pas de mal.
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